Brazeau loop (Jasper park)

Brazeau loop est une boucle de 5 jours dans le Sud du Parc de Jasper. Les vallées traversées sont très sauvages et le paysage varié. Le Jonas Pass nous fait découvrir les prairies d’altitudes avec des sommets enneigés tout autour, tandis que la Brazeau River nous entraîne dans la forêt de sapins humide et sombre. Une très bonne introduction aux rocheuses dans un terrain facile avec très peu de dénivellé.

Carte de Brazeau Loop
Carte de Brazeau Loop

Jour 1 : Nos premiers pas dans les Rocheuses

Le 17 juillet 2005

  • De Nigel trailhead (1830 m) à Boulder Creek campground (2000 m)
  • Temps de marche : 3 h 05
  • Distance : 10,7 km
  • Dénivelé montant : 485 m
  • Dénivelé descendant : 315 m
  • Altitude maximale : Nigel Pass (2195 m)

[Nicolas] Réveil à huit heures. Tout le monde dort encore dans ce petit camping. Il y a quelques nuages mais une belle journée s’annonce. Nous passons à Jasper pour prendre le petit déjeuner et le déjeuner. Quelle surprise de ne pas trouver de jambon ! Vive l’Alberta et la bouffe américaine ! Nous allons également au bureau des sentiers. Tout à l’air correct, les sentiers seront a priori un peu boueux, le temps mitigé, mais au moins, il n’y a pas eu d’alerte aux ours nous empêchant d’emprunter les sentiers prévus. Nous devons maintenant prendre la plus belle route des Rocheuses sur cent dix kilomètres pour rejoindre le départ de notre rando.

C’est tout simplement splendide ! La vallée est assez large, pleine de sapins et tous les trois kilomètres, on découvre de magnifiques sommets enneigés aux parois verticales. Les glaciers sont immenses et très épais. Sur la carte, je vois que le fameux Columbia Icefield s’étend sur environ cinquante kilomètres ! C’est tellement impressionnant. Et on voit tout ça de la route. Qu’est-ce que ça doit être en pleine montagne !

Nous faisons les sacs et à 12 h 45, nous faisons nos premiers pas de randonneurs dans les Rocheuses ! La photo de départ s’impose ! 3 h 30 de marche sont prévus avec 400 mètres de dénivelé. Dans la forêt, nous parlons beaucoup et fort pour avertir les ours de notre présence. Si on surprend un ours, il peut nous attaquer et un grizzli, c’est féroce, il peut même manger un ours noir ou un wapiti ! C est dire ! C’est sûr qu’on a un peu peur de croiser la bête mais j’aimerais vraiment en voir un, de loin bien sûr !

Le chemin monte très lentement et dans les vastes prairies, on aperçoit au loin les immenses montagnes. On pourrait croire que ce sont des faces himalayennes tellement il y a de la neige partout. Vers 2000 mètres, il n’y a plus aucun arbre et nous allons passer le Nigel Pass (col Nigel) dans les cailloux et les éboulis. C’est désertique. Mais très vite, on redescend et on aperçoit une immense prairie alpine dans laquelle un torrent s’étire et se disperse.

C’est très beau et ce serait un magnifique endroit de bivouac. Et en effet, le Boulder Creek campground se situe juste après la prairie à la lisière de la forêt.

[Solenne] Nous y arrivons à 16 h 45. Il n’y a que trois emplacements et il y a deux grandes tables en bois rond. On installe rapidement notre tente et on remarque que nos voisins sont bien équipés. Ils sont trois et ont des moustiquaires sur la figure. C’est super pratique parce que nous nous faisons littéralement dévorés par les moustiques. En passant près de leur table, nous voyons qu’ils ont aussi tout un attirail de cuisine : deux réchauds, deux casseroles et une poêle !!! Ca doit peser une tonne ! On ne s’attarde pas et on va faire notre toilette dans le torrent. Celui-ci est très large mais peu profond ce qui permet à l’eau de ne pas être trop froide. Ça fait du bien de se sentir propre et ça éloigne les moustiques (probablement parce qu’on dégage moins d’odeurs ! Mdr !!!)

En revenant, on voit nos voisins en train de faire cuire des légumes ! Des légumes frais ! Nous, on mange notre soupe et notre couscous déshydratés. Je précise que c’était plutôt bon parce que c’est loin d’être toujours le cas ! Nos voisins, qui ont commencé à cuisiner avant notre toilette, n’ont toujours pas fini ! On va faire notre vaisselle au torrent puis on passe aux petits coins (remarquablement bien aménagés d’ailleurs). En revenant, on voit nos voisins faire leur vaisselle dans un grand tupperware ! Je dis à Nico qu’ils ont probablement mis deux jours à venir ici et qu’ils rentrent demain. Mais un peu plus tard, en discutant avec eux, on apprend qu’ils font le tour Brazeau exactement comme nous ! Si on part ensemble le matin, ça va être intéressant de voir à quelle heure ils arrivent le soir ! [Nicolas] En effet, le lendemain, ils sont partis avant nous, on les a doublé et jamais revus. Ils ne sont pas allés au camping de Brazeau Lake. On ne saurait jamais ce qu’ils sont devenus. [Solenne] En fait, on a échangé quelques mots car à la fin de leur repas, le monsieur est venu nous proposer de la poitrine de poulet et du gâteau au chocolat qui lui restaient ! Ils sont très gentils mais je ne sais pas comment ils font pour porter tout ça !

[Nicolas] L’endroit est bourré de moustiques tous plus voraces les uns que les autres mais on résiste tant bien que mal à coup de Muscol et de grandes claques.

Encore un moustique écrasé ! Il y en a toujours cinquante qui tournent autour de nous en permanence. Ce n’est pas vraiment agréable.

Ce soir, nous allons suspendre nos sacs pleins de bouffe au bearpole : C’est une poutre horizontale accrochée à deux arbres à environ cinq mètres du sol. A l’aide d’une corde ou d’un câble, nous hissons nos sacs en haut pour les rendre inaccessibles aux ours. En espérant que ce soit efficace !

Jour 2 : La pluie dans la forêt

Le 18 juillet 2005

  • De Boulder Creek campground (2000 m) à Brazeau Lake campground (1795 m)
  • Temps de marche : 5 h
  • Distance : 19 km
  • Dénivelé montant : 310 m
  • Dénivelé descendant : 515 m
  • Altitude maximale : Boulder Creek campground (2000 m)

[Nicolas] Une longue journée de plat descendant (moins 200 mètres en cinq heures). En réalité, l’altimètre indique 310 mètres de montée, mais je me demande bien quand est-ce que ça a monté.

Une journée de forêt au bord d’un gros torrent ponctuée de plusieurs averses. Nous avons d’ailleurs mangé sous la pluie à midi et ce soir j’écris pieds nus auprès du feu car mes chaussures sont trempées. Je ne sais pas comment, mais cet après-midi, tout à coup, j’ai eu les deux pieds trempés, mais vraiment trempés. Ça faisait floc floc alors j’ai quitté et essoré mes chaussettes et j’ai continué pieds nus dans les chaussures ce qui était beaucoup plus agréable.

Un groupe de trois gars et une fille de Kamloops (Colombie Britannique) ont marché quasiment toute la journée en même temps que nous. Ils sont très sympas et ce soir, en bons canadiens, ils ont réussis à allumer un feu malgré la pluie pendant la journée. Explications : Il faut apporter sa petite hache pour fendre les bûches de sapins afin d’avoir un bois tendre et sec. Il faut aussi cueillir la barbe des sapins (old men barb) pour faire partir le feu sans papier. Et ça marche ! Ces gentils canadiens nous ont même fendue une bûche !

Le camping de ce soir est magnifique. Nous sommes dans la forêt, au bord d’un grand lac turquoise et on voit de grandes montagnes partout autour du lac. C’est incroyable tellement c’est beau. Grandiose et très canadien ! On s’est lavé dans le lac, tout nu et j’ai même essayé de rentrer dans l’eau pour me rincer. C’est trop trop froid ! Gelé !

Notre feu s’est presque entièrement consumé, nous allons bientôt aller nous coucher. Mes chaussures ont presque cramées près du feu et je pense qu’elles sont presque sèches. On verra ça demain.

Jour 3 : La souffrance de Solenne

Le 19 juillet 2005

  • De Brazeau Lake campground (1795 m) à Jonas Cutoff campground (2120 m)
  • Temps de marche : 5 h
  • Distance : 16.2 km
  • Dénivelé montant : 650 m
  • Dénivelé descendant : 325 m
  • Altitude maximale : Poboktan Pass (2300 m)

[Nicolas] Ce matin, nous marchons encore dans la forêt. Parfois, on aperçoit le lac Brazeau dans le bas et c’est vraiment très beau. Une eau turquoise comme à Tahiti (en plus froide) apparaît à travers les sapins.

Puis nous quittons le lac pour monter le vallon du torrent John-John. On est encore dans la forêt, mais au loin, on aperçoit des sommets enneigés. J’ai hâte de m’en approcher. A midi, nous sommes déjà au John-John campground.

J’avais fait le topo avec une heure de plus. Bizarre ! Enfin on ne va pas s’en plaindre. Mieux vaut cela que l’inverse. Surtout que Soso a très mal sur les tendons de la cheville gauche. C’est étrange. Elle n’a pas mal si elle marche sans chaussure. Mais avec, la partie montante de la chaussure appuie sur les tendons et ça a l’air de faire très mal. Journée de galère pour Soso. Heureusement que le magnifique paysage peut la distraire.

Nous sortons des arbres et montons dans une sorte de toundra où il y a pleins d’écureuils fouisseurs. Ils sont trop mignons ces petits reuil-reuils !

On voit toujours des tas de très hautes montagnes qui me donnent vraiment envie de revenir faire un tour par ici avec du matos (et un guide pour faire plaisir à Soso !) Le col Poboktan est à 2300 mètres. Il y a encore de l’herbe et beaucoup d’écureuils mais plus aucun arbre bien sûr. Nous y restons un bon moment à discuter avec le groupe de quatre qui vont nous suivre jusqu’à la fin. Ils sont vraiment très sympas et Greg va même prêter une sandale à Soso qui marche depuis une demi-heure pied nu dans l’herbe tellement elle a mal à la cheville. Il reste trois quarts d’heure de descente pour arriver au Jonas Cutoff campground. Nous retrouvons la forêt, et un peu plus loin découvrons le camping au bord d’un petit torrent. C’est très joli. Solenne va au torrent pour laver la sandale de Greg. Ses lunettes tombent à l’eau et Solenne avec, en essayant de les rattraper en vain. Elle est mouillée jusqu’aux genoux et sa chaussure aussi bien sûr !

C’est à son tour d’avoir les chaussures trempées. Sauf qu’ici, on ne peut pas faire de feu. Le soleil va sécher la chaussure pendant plusieurs heures avant que l’on aille se coucher. Mais je pense que, comme moi ce matin, Solenne va tenter la marche avec un sac plastique dans la chaussure. Ce n’est pas désagréable et ça m’a permis de marcher les pieds au sec ce matin, car mes chaussures étaient encore un peu mouillées malgré le feu d’hier soir. Ce midi, elles ont finies de sécher au soleil. Ce sera donc à Soso de marcher avec le sac plastique demain et avec (peut-être ?) la sandale de Greg.

Ce soir, nous avons mangé à la même table que le groupe de quatre (Cathy, Ed, Greg et Carl). Ils ont fait la cuisine avec des légumes frais, du beurre, du riz, des épices et une grosse saucisse. Un vrai repas d’origine Louisianaise à ce qu’ils ont dit. Ça avait l’air bon. On a eu le droit à quelques carottes en entrée et à une petite fiole d’une excellente essence d’amandes à mettre dans le thé. Ils sont sacrément équipés ces canadiens : deux réchauds à essence, des casseroles, etc.

Le campement est à 2120 mètres d’altitude. J’espère que nous n’allons pas avoir trop froid cette nuit. La nuit dernière, c’était juste et nous étions à 1800 mètres. Il a fait 4°C à neuf heures le matin. Nous avons apporté des collants pour dormir, comme cela, on peut dormir tout habillé car nos duvets ne sont vraiment pas chauds.

Jour 4 : La plus longue et la plus belle journée

Le 20 juillet 2005

  • De Jonas Cutoff campground (2120 m) à Four Point campground (1915 m)
  • Temps de marche : 6 h 30
  • Distance : 19.1 km
  • Dénivelé montant : 610 m
  • Dénivelé descendant : 815 m
  • Altitude maximale : Jonas Shoulder (2470 m)

[Nicolas] Hier soir juste avant d’aller nous coucher, nous avons vu une biche et un cerf qui sont passés en courant sur le site de bivouac. Ils auraient pu se prendre les pattes dans les ficelles de la tente !

Ce matin, une belle journée commence, il fait beau et un petit écureuil fouisseur vient nous tenir compagnie pour le petit déjeuner. Il essaye de nous prendre des miettes et j’essaye de le prendre en photo.

Nous montons vers Jonas Shoulder. Très vite, nous sortons de la forêt et retrouvons le pays de écureuils fouisseurs et des marmottes. La vue est déjà très belle et en arrivant à l’Epaule Jonas, c’est à couper le souffle.

360° de sommets enneigés supérieurs à 3000 mètres. Des parois verticales, des glaciers et des vallées recouvertes de sapins. Là encore un petit écureuil vient jouer avec nous. Il a senti la nourriture dans mon sac et essaye de l’atteindre. Hier, un écureuil a fait un trou dans le sac de Carl pendant qu’il dormait !

Pendant la montée, Solenne n’a pas trop souffert de sa cheville. Nous avons bricolé un système avec une cordelette pour écarter la chaussure à la cheville et ça a fonctionné. Mais à la descente, la douleur reviendra très vite. Pauvre Soso. Elle va encore marcher pieds nus dans l’herbe et se cogner le pied à un rocher. Elle a un orteil tout bleu maintenant. Comme Greg nous l’a proposé, nous allons l’attendre pour que Soso puisse finir la descente (il reste quatre heures) avec les sandales.

A midi, nous mangeons dans le vallon Jonas, côté ouest, avant le col. C’est superbe et nous sommes allongés dans l’herbe, bien habillés pour se protéger des moustiques. Saloperies ! On les appelle les petits tannants. Sans eux, les Rocheuses ne seraient plus les mêmes. Après le déjeuner, il faut encore aller jusqu’au col Jonas puis redescendre à Four Point campground. C’est quasiment plat mais il y a quinze kilomètres et ce sera très dur pour Soso avec les sandales et l’orteil tout bleu. D’ailleurs, j’écris cela le lendemain matin à huit heures et elle dort encore.

La descente est terriblement longue et nous marchons avec nos quatre amis. Nous devons même quitter les chaussures pour traverser quelques torrents, pas très impressionnants d’ailleurs, mais pas traversables sans se mouiller les pieds. Un couple en sans inverse nous dit que des traces d’ours ont été vues plus bas. Je suis vraiment content d’avoir une chance d’en voir un. En plus, en groupe de six personnes, nous ne craignons rien.

L’appareil photo est prêt, mais nous ne verrons que les traces et les trous que l’ours fait dans la terre pour chercher des écureuils. Pauvres petites bêtes… Ça ne doit pas être drôle de se faire sortir de son terrier par un grizzli avec des griffes de plus de cinq centimètres ! On voit aussi des troncs d’arbres griffés dont la sève coule le long du tronc.

La descente est interminable. On marche doucement et on s’arrête souvent. Solenne tombe en traversant un torrent à cause des sandales trop grandes et se fait mal au genou. Ce n’est vraiment pas sa journée !

Heureusement, tout au long du vallon Jonas, le paysage est grandiose. C’est le passage le plus beau de Brazeau loop. Le soir, à Four Point campground, nous faisons un grand feu avec nos quatre amis et parlons longuement avec Greg.

Jour 5 : Le long retour

Le 21 juillet 2005

  • De Four Point campground (1915 m) à Nigel trailhead (1830 m)
  • Temps de marche : 4 h 15
  • Distance : 13.9 km
  • Dénivelé montant : 450 m
  • Dénivelé descendant : 535 m
  • Altitude maximale : Nigel Pass (2195 m)

[Nicolas] Ce matin, on dort un peu car on est fatigué de la longue journée d’hier. On se lève donc à huit heures et cette fois, on est prêt en 1 h 40 environ, ce qui est un record. Faut dire qu’il faut un peu plus chaud à huit heures et que les affaires sont moins humides par la rosée.

Nous avons déjà parcouru tous les chemins d’aujourd’hui, le premier et le deuxième jour. Pourtant, c’est comme si c’était nouveau pour nous. Le ciel est d’un bleu limpide, c’est la plus belle journée.

Au Nigel Pass, nous avons une vue splendide sur le Mont Athabasca et les glaciers du champ de glace Columbia.

C’est tellement beau qu’on pique-nique juste après le col, en s’abritant du vent : notre dernier repas déshydraté de cette randonnée. Pas mauvais d’ailleurs. Faut dire que c’est notre pique-nique avec la meilleure vue sur les glaciers. Ça me fait rêver…

Il n’y a que deux heures de descente pour arriver à la voiture, mais ça nous paraît bien long. Solenne marche encore toute la journée avec les sandales de Greg.

On s’arrête souvent pour faire des photos. Solenne photographie les fleurs et voudrait retrouver le groupe de sapins avec les pommes de pin rouges qu’elle a vu le premier jour. C’est surprenant : à la pointe du sapin, les bourgeons des pommes de pin sont tout rouges et deviennent de vraies pommes de pin sur les branches plus basses. Il y a aussi des sapins avec des pommes de pin noires.

Peu après, nous voyons une sorte de perdrix avec ses cinq petits, pas farouches du tout. Puis enfin, nous arrivons : le tour Brazeau est terminé. Ça aura été bien dur pour Soso avec ses douleurs aux chevilles et son petit orteil tout bleu. Mais je crois qu’elle en gardera tout de même un excellent souvenir.

Nous reprenons la superbe route des glaciers vers Jasper et sommes arrêtés par un troupeau de chèvres blanches des montagnes puis par des mouflons et une biche. On voit plus d’animaux sur cette route que dans la montagne !